Deux questions sur l'organisation de la communauté fransaskoise
Le 12 juillet dernier, l'
Assemblée communautaire fransaskoise (ACF) a transmis un courriel aux directions et aux conseils d'administration des associations fransaskoises. Dans le contexte des élections de l'ACF, à titre d'éditeur de
www.fransaskois.info ayant à coeur la communauté, je souhaite répondre publiquement à ce courriel et soulever deux questions touchant directement l'organisation de la communauté fransaskoise.
Depuis des années, par son comité de répartition, l'ACF suggère à Patrimoine canadien la manière dont devrait être allouées les sommes destinées aux associations et aux projets touchant la communauté fransaskoise. Ces suggestions étaient généralement acceptées par Patrimoine, mais pas cette année. Cet hiver, Patrimoine canadien a passé outre plusieurs recommandations.
Radio-Canada a publié une nouvelle à ce sujet :
www.radio-canada.ca/regions/saskatchewan/2012/08/08/003-financement-organismes-francophones.shtmlEn réaction à ce désaveu de son comité de répartition, l'ACF a transmis un courriel dans lequel elle annonçait son boycottage de l'annonce officielle de Patrimoine canadien tout en incitant fortement les associations à faire de même. Voici en extrait de ce courriel:
«
Ceci étant dit, si jamais vous recevez un appel de quelqu'un du Ministère, nous vous encourageons fortement de songer aux perceptions que votre éventuelle participation pourrait avoir sur votre organisme et sur la communauté fransaskoise. Comme de raison, comme organisme autonome, vous êtes libre de choisir ce que vous voulez faire. »
Cette déclaration n'est pas acceptable. La solidarité est un sentiment partagé permettant une action commune. Ce ne doit pas être un soldat qu'on enrôle pour impressionner l'adversaire.
Les associations fransaskoises n'ont pas à se faire rappeler qu'elles sont libres de leurs actions. Qu'elles soient régionales ou provinciales, elles ne sont pas redevables à l'ACF, mais bien à leur assemblée propre. L'ACF est l'organe de représentation politique de la communauté fransaskoise. Elle se doit de servir la communauté, non l'inverse. L'ACF doit être un leader de la communauté, pas son bureau de direction.
--
L'ACF est l'organe de représentation politique de la communauté, mais est-elle toujours représentative des 17 500 francophones de la Saskatchewan? La question se pose puisque l'ACF n'a pas de réel membership. Elle n'a pas d'assemblée générale publique. Elle tient plutôt des élections auquelles personne ne vote plus. Le président, comme les députés de l'ACF, sont donc élus, pourrait-on dire, par acclamation dans une salle vide. Il y a là un déficit démocratique.
Les conseils d'administration des associations sont aussi souvent nommés par acclamation, mais dans le cas de ces dernières, il existe de réels memberships et de réelles assemblées générales.
Cette question de légitimité est devenue si évidente que dans le dossier de l'Institut français, l'ACF a jugé bon de faire signer une pétition aux présidents des associations fransaskoises. Une telle pétition n'aurait-elle pas été superflue si l'ACF avait eu la conviction de représenter vraiment les Fransaskois?
Il n'y a pas à douter que les prochaines élections seront un test important dont prendront acte les interlocuteurs de l'ACF ainsi que toute la communauté fransaskoise.
Première question : la forme actuelle de l'ACF est-elle toujours pertinente pour représenter avec force et légitimité les Fransaskois?--
La répartition des fonds destinés à la communauté est une question difficile. Ici comme ailleurs, les besoins et les idées sont infinis et les ressources limitées. On dit que l'argent est le nerf de la guerre, on pourrait ajouter qu'il est le coeur des chicanes. C'est pourquoi il est important d'avoir un mécanisme objectif et compétent permettant de juger au mieux les besoins et les opportunités pour que la communauté tire le maximum des fonds disponibles. C'est un travail difficile, mais essentiel.
À l'égard de son financement, la communauté a connu des tiraillements importants dans le passé. La fin de l'ACFC et la création de l'ACF ne sont pas étrangères à ces disputes. Même s'il nous faut éviter de redonner vie à ces conflits, il demeure essentiel de s'interroger sur la manière dont sont attribués les fonds destinés à la communauté.
Dans son fonctionnement actuel, le comité de répartition de l'ACF recommande non seulement les projets d'autres organismes, mais aussi les siens propres. L'ACF est donc juge et parti lorsqu'elle recommande de financer un projet plutôt qu'un autre.
Si l'ACF limitait le domaine de ses activités, cela ne serait pas réellement problématique. Toutefois, au cours des années, l'ACF a beaucoup élargi ou souhaité élargir le domaine de ses activités : Terroir, Francofièvre, minifièvre, Fête fransaskoise inc., Baudoux connexion internet, emploi, immigration, radio communautaire, gestion d'organismes locaux, calendrier communautaire, site web d'archives.
Seconde question : L'ACF n'est-elle pas en conflit d'intérêts lorsqu'elle juge et recommande le financement de ses propres activités?--
Une ACF forte est nécessaire à une communauté forte, mais cette force discréditée ou mal utilisée deviendrait nuisible à la communauté
Les deux questions posées ici n'ont pas de réponses simples ou faciles, mais on ne peut pas les esquiver. Pour toute la communauté fransaskoise, ces questions méritent des réponses, tant par les paroles que par les gestes.
Daniel Paquet
Éditeur de fransaskois.info
--
(NDLR Fransaskois.info n'a jamais présenté de demande de subvention à l'ACF ou à Patrimoine canadien.)